La criminologie s’intéresse de près à la prédiction de la récidive, surtout chez les délinquants sexuels. Pourquoi ? Parce qu’une évaluation précise du risque permet de mieux protéger la société, d’adapter les peines et de cibler les interventions thérapeutiques. Mais *comment* prédire ce risque avec rigueur ? Une méta-analyse majeure, réalisée par le chercheur R. Karl Hanson et publiée en 2007, apporte des réponses éclairantes.
Une étude clé : Une méta-analyse de 118 recherches
L’article The Accuracy of Recidivism Risk Assessments for Sexual Offenders (Hanson, 2007) synthétise 118 études menées entre 1970 et 2006, impliquant plus de 45 000 délinquants sexuels.
Objectif : évaluer la fiabilité des outils utilisés pour prédire la récidive.
Les méthodes d’évaluation comparées:
1. L’approche clinique : Basée sur le jugement subjectif des professionnels (médecins, psychologues).
2. Les outils actuariels : Des échelles statistiques objectivées (ex : Static-99, RRASOR) croisant des facteurs de risque (âge, antécédents, type d’infraction…).
Résultats marquants
1. La supériorité des outils actuariels :
– Ils prédisent la récidive avec une précision modérée mais significative (AUC ≈ 0,67 à 0,75).
– Les échelles comme la Static-99 sont plus fiables que le jugement clinique seul, car elles éliminent les biais cognitifs.
2. Les limites du jugement clinique :
– Les évaluations subjectives (jugement professionnel non structuré) sont moins précises (AUC ≈ 0,58), souvent influencées par des stéréotypes ou l’expérience individuelle du clinicien.
Implications pratiques
Pour la justice :
Les outils actuariels aident à prioriser les ressources (surveillance renforcée, thérapies) pour les individus à **haut risque**, évitant la sur-surveillance des profils à faible risque.
Pour la réinsertion :
Combiner outils actuariels et évaluations dynamiques (comportement en détention, progrès thérapeutiques) offre une vision plus complète.
Pour les cliniciens :
Hanson souligne la nécessité de former les professionnels à l’usage des échelles validées, sans négliger le contexte individuel.
Les défis persistants
1. Le risque de stigmatisation :
Un score élevé ne doit pas conduire à une exclusion définitive. L’étude rappelle que la majorité des délinquants sexuels ne récidivent pas (taux moyen de récidive à 5 ans : 10-15%).
2. L’évolution des outils :
Les recherches récentes intègrent désormais des facteurs de protection (soutien social, emploi) pour affiner les prédictions (ex : outils STABLE-2007).
La méta-analyse de Hanson confirme que la science a progressé dans l’évaluation du risque de récidive, mais elle rappelle une évidence : aucun outil n’est infaillible. L’avenir ? Allier la rigueur des données à une approche humaine, où l’évaluation sert avant tout la prévention et la réinsertion.
Hanson, R. K. (2009). The accuracy of recidivism risk assessments for sexual offenders: a meta-analysis of 118 prediction studies. Psychological Assessment, 21(1), 1–21.

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