Dossier spécial « Récidive sexuelle »
Aujourd’hui encore, persiste un discours assimilant des délinquants sexuels aux figures du «prédateur sexuel» et du «serial killer». Cependant les travaux sur lesquels reposent ces représentations portaient sur un petit nombre de cas extrêmes et extraordinaires: le contraire de la représentativité. Les recherches sur lesquelles s’appuient les articles publiés dans le présent dossier sont d’une toute autre facture; elles visent la rigueur, l’exactitude et la représentativité. C’est animé par ces soucis que Jean Proulx a décidé de lancer au cours des années 1990 une vaste enquête ayant pour but d’étudier systématiquement et le plus complètement possible un échantillon de délinquants sexuels réunis avec le plus grand soin. Ainsi, entre 1995 et 2000, tous les détenus ayant commis une agression sexuelle entrant dans un pénitencier du Québec furent invités à participer à la recherche. Pas moins de 593 individus condamnés à une peine de plus de deux ans d’incarcération acceptèrent. Quelques années plus tard, en 2006-7, Jean Proulx et son équipe relancent les sujets de l’échantillon initial dans le but d’étudier leur récidive et l’éventuel effet du traitement. Sensiblement à la même époque, Karl Hanson entreprenait une série d’études sur la prédiction de la récidive sexuelle à partir de gros échantillons de détenus canadiens et en réalisant des méta-analyses des recherches réalisées dans plusieurs autres pays. Pour informer les lecteurs de la Revue internationale de criminologie et de police technique et scientifique des résultats de ces travaux, nous avons réuni dans ce dossier spécial cinq articles qui répondent à autant de questions.
La première question visait à savoir si les traitements offerts en milieu carcéral aux agresseurs sexuels faisaient baisser leur probabilité de récidive. Plus précisément, Anouck Marchand et Jean Proulx se sont demandés si les agresseurs sexuels qui reconnaissent leurs délits, qui connaissent les stratégies de prévention de la récidive et collaborent au traitement, récidivent moins que les autres. La réponse mise de l’avant est à la fois nuancée et surprenante. La deuxième question est la suivante: Comment les agresseurs sexuels ayant retrouvé la liberté après une incarcération expliquent-ils, pour les uns, pourquoi ils ont récidivé et, pour les autres, pourquoi ils n’ont pas récidivé? C’est dans les discours des premiers intéressés que Catherine Rossi, Maurice Cusson et Jean Proulx ont été chercher la réponse. Le lecteur constatera que les délinquants sexuels interrogés fournissent une version inédite de leur cheminement et de leurs efforts pour éviter de retourner sous les verrous. Ces mêmes sujets n’avaient pas seulement évoqué les raisons pour lesquelles ils avaient, ou non, récidivé, en outre, ils ne s’étaient pas gênés pour dire ce qu’ils pensaient des traitements reçus au pénitencier. L’analyse de leurs propos conduit Rossi, Cusson et Proulx à répondre à une troisième question: Les délinquants sexuels pensent-ils qu’ils ont cessé d’agresser sexuellement à cause du traitement ou pour d’autres raisons ?
http://www.polymedia.ch/htdocs/Files/Criminologie/CR-archives/RICPTS_2009-04.pdf
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