Claude-Olivier Doron (juin 2007) Gouverner la dangerosité : sur quelques légitimations de l’injonction de soin
Communication au colloque « La politique des faux semblants », Pratiques de la folie, juin 2007
Tout l’enjeu du travail thérapeutique va être justement convertir ce mode de rapport à soi sous un mode pulsionnel en un mode de rapport à soi sous un mode responsable et coder ce rapport à soi sous un mode pulsionnel comme une « résistance », une manière qu’a le sujet de se dédouaner de sa responsabilité, de « se trouver des excuses » ; on va impliquer à tout les niveaux le sujet dans le processus de soin et ainsi le responsabiliser. On désactive la problématique pulsionnelle pour passer à une problématique relationnelle. Cette position est très claire dans la prise en charge mise en place dans les SPIP et l’on comprend bien pourquoi. Le pulsionnel ne regarde absolument pas les CIP ; par contre, ils peuvent travailler sur le relationnel, où ils servent de médiateurs de la loi. « On essaye de leur faire admettre l’idée que s’ils ont agi mal, c’est qu’ils n’avaient pas suffisamment réfléchi à ce qu’ils faisaient […] leur problème, c’est l’intégration de la loi au sens fort du terme […] On s’efforce de rendre le sujet responsable de son acte, de la sanction et du suivi qui lui sont corrélatifs…
La présence, tout au long du suivi, d’une obligation sanctionnée par un dispositif judiciaire offre au sujet une forme « d’étayage » qui lui permet de persévérer dans sa thérapie. « La sanction ouvrant sur l’obligation, sous la forme d’une injonction pénale, prendra tout son sens : elle soutiendra le sujet dans son travail psychique, dans la peine qu’il prendra pour mettre en place puis partager les valeurs de ses contemporains. Ce travail , qui ne pourra se réaliser qu’avec un professionnel formé et averti, voit les termes de soin, de surveillance et de sanction devenir des partenaires indissociables. » En vérité, « le soin et la surveillance sont cousins germains. On conçoit mal un soin sans surveillance et une surveillance qui ne prenne pas soin sous une forme ou sous une autre. » Le thérapeute n’a donc pas à trop se préoccuper s’il occupe une fonction de surveillance ; elle coïncide plutôt qu’elle ne s’oppose à sa fonction de soignant. Quant au partage des informations entre justice et médecine, point si brûlant dans la prise en charge des AVS, il convient de l’envisager dans le cadre plus large du partage des informations entre soignants et la notion de « secret médical partagé » qui est l’un des principes décisifs de la prise en charge établi par l’ARTAAS. « On ne peut pas travailler seul avec ces sujets. ». En effet, le sujet est marqué par le clivage et le déni. Multiplier les points de vue, les instances d’observation et d’examen, autour de lui, constitue un moyen de briser ce clivage. C’est évident dans le transfert des informations entre justice et psychiatrie : le développement de « liens » entre justice et psychiatrie, dans le respect des limites déontologiques de chacun, facilite le travail thérapeutique en permettant de s’attaquer au clivage et au déni, en confrontant par exemple le sujet à la réalité des faits pour lesquels il a été condamné.
si le lien est brisé:DORON gouverner_la_dangerosite
Laisser un commentaire
Vous devez vous connecter pour publier un commentaire.