L’exécution de la peine privative de liberté, Problèmes de politique criminelle
Anabela Miranda Rodrigues
Professeur à la Faculté de Droit de l’Université de Coimbra, Directrice du Centre d’Etudes Judiciaires , Portugal
Colloque de la Fondation internationale pénale et pénitentiaire « L’exécution des sanctions privatives de liberté et les impératifs de la sécurité » 2006 , Budapest, Hongrie
L’identification des individus dangereux (risk offenders) est faite par des méthodes de type actuariel – on parle d’actuarial justice – la méthode de “l’analyse des risques” (risk assessment). Ceci suppose de prendre comme base des “indicateurs”, dont la quantification est le point de départ pour établir un pronostic sur le danger de certains groupes ou classes d’individus. La punition ne dépend ni de la nature du crime, ni de la personnalité du délinquant, mais bien de l’évaluation de son profil de risque, lequel détermine la durée du contrôle: plus ou moins prolongé selon le danger (…)
Le changement est substantiel: à l’inverse de la “vieille” pénologie, qui se basait sur l’individu et se préoccupait des causes de la perpétration du crime, ayant en vue sa “correction”, la “nouvelle” pénologie s’intéresse au groupe de risque auquel est dit appartenir l’individu, pour le rendre inoffensif, le surveiller et le contrôler. De nouvelles techniques pénologiques (surveillance électronique ou techniques statistiques) surgissent, qui ont pour objectif d’établir des niveaux de risque et de prévoir le danger, pour adapter ainsi le contrôle aux niveaux de risque présentés par un certain groupe d’individus. La culpabilité ayant été substituée par le danger, il est demandé à l’État de faire de la gestion du risque (du crime), en présumant que la société, ayant sacralisé la valeur sécurité, renonce à supporter un risque, quel que soit son pourcentage. Quand la culpabilité définit la frontière absolue de distribution des risques entre l’individu et la société, c’est sur cette dernière que retombe le risque de récidive. Inversement, la gestion efficace du risque que le nouveau abordage du crime requiert, implique qu’il retombe sur l’individu, le soumettant à une intervention de sécurité et de contrôle d’intensité maximale. La récidive est un facteur d’évaluation de l’efficacité du contrôle exercé sur l’individu – c’est le système comme tel qui est sujet à évaluation et non le succès ou l’échec d’un programme de traitement, de telle sorte qu’un haut taux de récidive est un signal positif que le système a la capacité de détecter. Cela implique une nouvelle orientation des instruments traditionnels (par exemple: probation ou liberté conditionnelle), qui ne sont plus vus comme moyens de réhabilitation individuels, mais bien comme des mesures efficaces de contrôle prolongé des individus. De cette création par le système de ses propres expectatives relativement à son accomplissement découle une auto‐limitation de son exposition à des indicateurs qu’il contrôle lui‐même: les gestionnaires du système peuvent assurer que leurs problèmes ont une solution.
http://fondationinternationalepenaleetpenitentiaire.org/
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09. Budapest – Anabela Miranda Rodrigues
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