Ressources en psychocriminologie, psychologie forensique et criminologie
Header

Camille Lancelevee (2016) Quand la prison prend soin

janvier 17th, 2018 | Publié par crisostome dans DANGEROSITE | PSYCHIATRIE MEDICO-LEGALE | Recherche | THÈSES/MÉMOIRES

Camille Lancelevee (Thèse EHESS 2016) « Quand la prison prend soin »

« Comparaison  n’est  pas  raison »  rappelle  avec  justesse  Franz  Schultheis  :  la comparaison est en effet chose difficile. Toujours située, elle met en miroir deux réalités résultant d’histoires sociales différentes et suggère que les objets comparés pourraient être les révélateurs d’un illusoire  « modèle »  national.  La  comparaison  proposée  dans  cette  thèse  ne  sera  pas  une comparaison  « terme  à  terme »  qui  analyserait  les  situations  française  et  allemande  à  l’aune  de modèles prédéfinis mais une comparaison « méthodologique » : l’éclairage de la situation allemande permettra de mettre à l’épreuve les représentations sociales françaises. Il s’agira de déconstruire le problème social des « prisons asiles » en France. Ma thèse montrera que ce problème social résulte d’une construction sociale pétrie de représentations devenues évidentes, qui s’interposent comme un voile  « entre  les  choses  et  nous,  et  qui  nous  les  masque  d’autant  mieux  qu’on  le  croit  plus transparent »  (Lenoir).  C’est  pour  lever  ce  voile  que  je  propose  de  porter  le  regard  sur l’Allemagne, pays dans lequel la défense sociale s’est matérialisée dès le début du XXème siècle en un dispositif  cohérent.  La  comparaison  avec  la  situation  allemande  permettra  ainsi  de  mettre  en perspective les transformations à l’œuvre en France, qui participent, comme le montrera cette thèse, à  produire  un  dispositif  similaire  de  défense  sociale,  c’est-à-dire  un  dispositif  qui  tente  d’allier protection  de  la  société  et  traitement  des  individus  identifiés  comme  « dangereux ».  Ces transformations seront saisies en un point du système pénal – les prisons de Grünstadt (Allemagne) et de Tourion (France) – où j’étudierai ces tensions constantes entre soigner et punir.

 

Ces paradoxes se traduisent pour ces différents professionnel·le·s du soin et de la peine en des dilemmes moraux permanents, que les institutions carcérales françaises et allemandes cherchent à résoudre en tentant d’ordonner les pratiques professionnelles autour d’un mode d’intervention sur autrui unique, univoque  et  uniforme,  qui  mettrait  le  traitement  au  service  d’un  programme  de  réhabilitation psycho-criminologique.  Au  nom  de  cette  ambition,  qui  s’inscrit  dans  une  recherche  d’efficience institutionnelle,  il  s’agit,  en  France  comme  en  Allemagne,  d’améliorer  la  coordination  des  acteurs professionnels et la circulation des informations relatives aux personnes détenues. La comparaison franco-allemande  permet  ici  de  réfléchir  aux  enjeux  de  l’institutionnalisation  du  care :  en  France, l’analyse montre ainsi que la place accordée aux soins psychiatriques a paradoxalement pour effet de freiner la mise en place d’un suivi plus pénitentiaire ; en Allemagne au contraire, le solide ancrage de ce  suivi  individualisé  rend  difficile  l’instauration  de  relations  de  soins  dégagée  d’un  objectif  de réhabilitation  psycho-criminologique.

Quand la prison prend soin

Vous pouvez suivre les réponses à cet article via le RSS 2.0 Vous pouvez commenter tout en bas. Les pings ne sont pas autorisés pour le moment.

Laisser un commentaire