Manuel Eisner, professeur de criminologie à l’Université de Cambridge, explore dans son article « Long-Term Trends in Global Homicide: Violence, Development, and Social Change » (2023, Annual Review of Criminology) , les tendances historiques et contemporaines des taux d’homicides à l’échelle mondiale (chifres confirmés par ceux de l’UNODC). En analysant des données provenant de plus de 100 pays sur plusieurs siècles, il met en évidence une baisse significative des homicides depuis le Moyen Âge jusqu’au XXIe siècle, avec des variations régionales marquées.
Points clés :
- Declin séculaire : Les taux d’homicides ont chuté dans la plupart des régions du monde depuis le XVe siècle, grâce à la consolidation des États-nations, au monopole étatique de la violence légitime (Weber), et à l’amélioration des conditions socio-économiques.
- Inégalités régionales : Certaines régions (Amérique latine, Afrique subsaharienne) connaissent des taux élevés persistants, liés à la faiblesse des institutions, aux inégalités, et aux marchés illicites (e.g., trafic de drogues).
- Impact de la modernité : La baisse récente en Europe et en Asie est attribuée à des politiques de prévention, une meilleure éducation, et une gouvernance efficace.
- Stagnation récente : Depuis 2010, certains pays occidentaux observent une stagnation ou une légère hausse, potentiellement liée à des fractures sociales, aux réseaux sociaux, ou à l’accès aux armes.
Implications : Eisner souligne l’importance de renforcer les institutions locales, de réduire les inégalités, et d’adapter les politiques de sécurité publique aux contextes culturels. Il appelle à une approche interdisciplinaire pour comprendre les dynamiques complexes de la violence.
Et en FRANCE?
→47.37% de hausse entre 2012 et 2024
Entre 2012 et 2023 (les données pour 2024 n’étant pas encore consolidées), les taux d’homicide basés sur les sources officielles françaises (Ministère de l’Intérieur, INSEE, ONDRP) et les analyses récentes indiquent une « remontée » significative :
Chiffres clés pour 2012
- Nombre total d’homicides : 665 homicides (dont environ 30 % de féminicides).
- Taux pour 100 000 habitants : 1,01 homicide pour 100 000 habitants (sur une population de ~65,7 millions d’habitants).
Répartition et contexte
- Typologie des homicides :
- Violences intrafamiliales : Environ 200 homicides (dont 148 femmes tuées par leur conjoint ou ex-conjoint).
- Règlements de comptes : Environ 10 % des cas, liés au crime organisé ou au trafic de drogues.
- Autres motifs : Conflits interpersonnels, violences crapuleuses, etc.
- Armes utilisées :
- Armes blanches (40 %), armes à feu (30 %), autres méthodes (30 %).
- Comparaison européenne :
Chiffres clés pour 2024:
- Nombre total d’homicides : 980 victimes (source)
- « Sur l’année 2024, le nombre d’homicides diminue (-2 %) pour la première fois depuis 2020, tandis que les tentatives d’homicide poursuivent leur nette progression (+7%), avec un rythme d’augmentation proche de celui observé depuis 2016 (+8 % par an), mais en ralentissant toutefois par rapport aux deux années précédentes ». (source)
Répartition par typologie
- Violences intrafamiliales et conjugales :
- 30 % des homicides (soit ~270 cas), dont 85 % de victimes féminines (environ 150 femmes tuées par leur conjoint ou ex-conjoint).
- Principales armes : armes blanches (40 %), strangulation/coups (30 %), armes à feu (20 %).
- Contexte : Malgré les mesures renforcées (Grenelle 2019, bracelets anti-rapprochement), la persistance des féminicides reflète des lacunes dans la protection des victimes.
- Règlements de comptes et trafics illicites :
- 25 % des homicides (~225 cas), majoritairement liés au trafic de drogues (guerres de territoires, narcobanditisme).
- Zones critiques : Marseille (40 % des règlements de comptes en France), Paris (banlieues sensibles), Lille et Strasbourg.
- Armes utilisées : Armes à feu dans 70 % des cas (pistolets automatiques, AK-47).
- Conflits interpersonnels (hors famille) :
- 20 % des cas (~180 homicides), souvent liés à des disputes (voisinage, conflits économiques, violences de rue).
- Profil des auteurs : Majorité d’hommes jeunes (18–35 ans), souvent sous l’emprise d’alcool ou de drogues.
- Autres motifs :
- Crimes crapuleux (vols avec violence, cambriolages mortels) : ~15 %.
- Homicides en détention : ~10 cas annuels.
Répartition géographique
- Île-de-France : 25 % des homicides (dont 50 % liés au trafic en Seine-Saint-Denis, Val-d’Oise).
- Provence-Alpes-Côte d’Azur (PACA) : 20 % (dont Marseille, épicentre des violences liées aux stupéfiants).
- Grand Est et Hauts-de-France : 15 % chacun (trafic transfrontalier, réseaux criminels).
- Zones rurales : 10 % (violences conjugales souvent sous-déclarées).
Facteurs contextuels en 2023
- Trafic de drogues :
- Explosion des marchés de cocaïne et cannabis, avec des revenus estimés à 3,5 milliards d’euros annuels.
- Concurrence accrue entre clans (ex. : Yoda, DZ Mafia) pour le contrôle des « points de vente ».
- Armes illégales :
- 30 % des homicides commis avec des armes à feu, souvent issues du trafic est-européen.
- Hausse des armes de guerre saisies (2023 : +15 % vs 2022, selon la DGSI).
- Crise socio-économique :
- Précarité, chômage des jeunes et fracture territoriale exacerbent les tensions dans les quartiers prioritaires.
- Impact des politiques publiques :
- Plan « quartiers de reconquête républicaine » : Déploiement de 3 000 policiers supplémentaires dans les zones sensibles.
- Lutte contre les violences conjugales : 45 000 interventions policières mensuelles pour protection des victimes.
Pour des données définitives :
- Consultez le rapport 2023 du Service statistique ministériel de la sécurité intérieure (SSMSI)
- Données détaillées sur le site du Ministère de l’Intérieur.
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