MANIFESTE POUR UNE PEINE JUSTE ET EFFICACE
Avant l’organisation de la conférence de consensus sur la prévention de la récidive, une étape importante fut, le 13 juin 2012, la publication dans libération du manifeste pour une peine juste et efficace.
Pour une amnistie des courtes peines
Dans un avis publié au Journal officiel mercredi, le contrôleur général des lieux de privation de liberté, Jean-Marie Delarue, plaide pour une loi d’amnistie des peines de prison «très légères» non exécutées faute de moyens. Une loi d’amnistie est du ressort du président de la République. Traditionnellement, elle était votée après l’élection présidentielle. Pratique à laquelle Sarkozy a mis fin en 2007, comme à celle des grâces du 14 juillet. Jean-Marie Delarue juge qu’une nouvelle loi serait la bienvenue en 2012 : «L’amnistie ne constitue ni une incongruité juridique ni une étrangeté démocratique.» Mais le gouvernement a écarté cette idée hier.
24 000 nouvelles places de prisondoivent être construites d’ici à 2017, selon un texte voté en début d’année. Coût du projet : 3 milliards d’euros. On ne sait pas si la gauche reviendra sur ce programme.
«Nous devons tout d’abord créer en France une véritable peine de probation qui pourra être prononcée au lieu et place de l’emprisonnement.»
Le manifeste «Pour une peine juste et efficace» lancé hier dans Libération par des chercheurs et des professionnels de la justice et de la prison
Pour une peine juste et efficace
« Depuis dix ans, le système pénal français est engagé dans une course folle, qui est aussi une course à l’abîme. Une véritable frénésie législative – 29 lois pénales votées en 10 ans – a conduit a la multiplication des incriminations et des occasions de recours a l’emprisonnement, générant une augmentation continue de la sévérité des peines de prison prononcées et du nombre de personnes entrant en prison. 66 000 personnes détenues s’entassent dans des prisons prévues pour en accueillir 57 000.
Les résultats de cette politique doivent être pris pour ce qu’ils sont : le témoignage d’un échec et la promesse d’une faillite. Chacun sait que le projet d’extension sans précédent du parc
immobilier pénitentiaire ne sera pas, comme il ne l’a jamais été, de nature à endiguer la surpopulation carcérale -« le parc pénitentiaire est d’ailleurs passé de 47 000 places en 2002 à
57 000 aujourd’hui, sans que le taux de surpopulation n’ait significativement baissé. Et bien que le nombre d’aménagements de peine ait augmenté pendant toute cette période, les prévisions demeurent sombres : dès l’été, le nombre de personnes incarcérées atteindra vraisemblablement les 69 000 détenus. Cet accroissement ne présente pourtant, comme le Conseil de l’Europe le rappelle, aucune corrélation avec l’évolution de la délinquance. Il s’agit donc d’un choix politique.
Praticiens, observateurs et acteurs de la justice, nous mesurons tous les jours dans notre quotidien les effets de cette situation. Plus de dix années après la dénonciation parlementaire de prisons qualifiées de « hontes de la République », les conditions de détention sont toujours profondément dégradées, réduisant à néant les intentions positives inscrites dans la loi pénitentiaire.
Nous affirmons haut et fort: ces choix procèdent d’une démarche idéologique et irrationnelle, coupée de la réalité. Car l’ensemble des recherches internationales menées depuis
plus de vingt ans converge vers les mêmes conclusions: le recours systématique à l’emprisonnement aggrave les risques de récidive. C’est pourquoi nous appelons a sortir des enjeux politiciens et de l’ornière dans laquelle notre système pénal est englué. Au nom de l’efficacité, et forts de l’apport de travaux., de programmes et de politiques expérimentées et rigoureusement évaluées, nous en appelons à la mise en œuvre d’une politique de prévention de la récidive digne de ce nom articulée autour du développement de la probation et cantonnant l’enfermement aux cas les plus graves…. »
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