Ressources en psychocriminologie, psychologie forensique et criminologie
Header

FRANCE CULTURE (2022)Émission LSD, « Viole-és, une histoire de dominations »

Épisode 1/4 : Poser ses mots

Lundi 10 octobre 2022 (première diffusion le lundi 7 décembre 2020)

Ici, après, des victimes cherchent à formuler le trauma.

« C’est en même temps ce qui me défigure et ce qui me constitue”, écrit Virginie Despentes dans « King-Kong Théorie » pour qualifier son viol.

Mathilde, Baptiste, Marcia & Sol, des victimes de viol ont la parole, elles racontent l’après, les chemins semés d’embûches, les traumatismes — après l’amnésie parfois —, l’isolement social, mais aussi l’ampleur des violences hétérosexistes, l’inertie des pouvoirs publics, leurs luttes et la colère, qu’elles réhabilitent.

Épisode 2/4 : Rompre les silences

Mardi 11 octobre 2022 (première diffusion le mardi 8 décembre 2020)

Des mythes résonnent comme des injonctions au silence pour les minorités : le violeur noir ou arabe, l’homosexuel-pédophile, la lesbienne qui regrette, la conjointe et la prostituée forcément consentantes, la femme handicapée forcément reconnaissante… À elles de dire “moi aussi”.

En octobre 2017, en 24h, plus de 2 millions de femmes témoignent en ligne des violences sexuelles qu’elles ont subi. Leurs récits sont réunis par un “mot-dièse”, #Metoo. L’onde de choc est mondiale. Depuis, d’autres vagues ont déferlé : #Metoo dans le sport, dans la musique, la cuisine… Mais Mathilde Forget précise « Ce n’est pas la parole qui se libère. C’est l’écoute qui est en train d’évoluer, d’être interrogée et interpellée. Il faut continuer. Elle est exigeante, cette écoute. Elle est fuyante, mais il faut l’entraîner ».

Les minorités sexuelles et racisées et les victimes d’inceste et/ou de violences dans l’enfance, sont proportionnellement surreprésentées parmi les victimes de violences à caractère sexuel. Les écouter, c’est comprendre les rouages d’un système où le viol n’est pas affaire de sexe ou de sexualité, mais de pouvoir. Matthieu Foucher constate que “Dans beaucoup de cas, la famille choisit la famille plutôt que de protéger la personne qui a été victime de ces violences”

Épisode 3/4 : Fabriquer d’autres récits

Mercredi 12 octobre 2022 (première diffusion le mercredi 9 décembre 2020)

Celles et ceux qui s’expriment ont fabriqué d’autres récits, proposés d’autres imaginaires. En racontant leurs réalités, elles et ils reprennent le pouvoir sur des narrations longtemps confisquées.

“Les premières années après le viol, surprise pénible : les livres ne pourront rien pour moi” écrit Virginie Despentes dans King-Kong Théorie, mais d’autres récits s’écrivent comme celui d’Annie Ernaux “Pourquoi je vais employer le terme « consenti » ? Ce terme de consentir va devenir depuis #MeToo le verbe clé”.

Annie Ernaux a longtemps craint de mourir avant d’avoir écrit son roman Mémoire de fille, “le trou inqualifiable, le texte toujours manquant”. Dans ce documentaire, elle emploie le terme “viol”, qu’elle a longtemps refusé, pour décrire l’expérience vécue par La fille de 58, “Quand vous prononcez ces mots, maintenant j’en vois l’ampleur, l’ampleur de la violence, l’inadmissible. Vous avez raison et maintenant, j’ai raison de dire viol ».

Épisode 4/4 : Se défendre

Jeudi 13 octobre 2022 (première diffusion le jeudi 10 décembre 2020)

Interroger la lutte contre le viol, émergé dans les années 70, et penser, comme cela a été fait dès les prémices de cette lutte féministe, des alternatives au système pénal et carcéral.

Depuis les années 70, le viol est devenu un sujet féministe, et politique à part entière. La loi reconnaît le viol comme un crime. Pourtant, seulement 1/10e des plaintes aboutit à une condamnation, et la correctionnalisation, la requalification des viols en “agressions sexuelles” est légion.

Les failles de la justice en matière de lutte contre les violences sexuelles sont régulièrement dénoncées, comme le précise Marcia Burnier “La justice a une vision du viol complètement déconnectée de la réalité et arrive très peu à punir. 1% des violeurs vont en prison, ça laisse quand même 99% de victimes qui n’obtiennent pas la réparation via le processus judiciaire.” et Mathilde Forget rajoute “En fait, mon intimité n’a jamais été protégée jusqu’ici. Et maintenant, qu’on va le condamner, lui, on va faire ça caché. Je ne comprends pas le projet.”

Québec, le 7 août 2022 – Le ministre de la Justice et procureur général du Québec, M. Simon Jolin-Barrette, et la bâtonnière du Québec, Me Catherine Claveau, sont heureux d’annoncer le lancement du Guide des meilleures pratiques en matière d’interrogatoires et de contre-interrogatoires en ce qui concerne les victimes d’agression sexuelle et de violence conjugale.

Le Guide est le résultat d’une réflexion menée par un groupe de travail comprenant des avocates et avocats du Directeur des poursuites criminelles et pénales (DPCP), des membres d’associations d’avocates et avocats de la défense, des représentantes et représentants du ministère de la Justice, des expertes et experts en victimologie et criminologie et d’autres intervenantes et intervenants judiciaires.

Ce document vise à améliorer l’accompagnement des personnes victimes de violences sexuelle et conjugale. Il s’adresse principalement aux avocates et avocats qui agissent pour la poursuite ou la défense. Le Guide pourra s’avérer également utile pour les juges, les corps policiers, les intervenantes et intervenants sociaux et les autres actrices et acteurs judiciaires dans la gestion des dossiers en lien avec les violences sexuelle et conjugale.

Les objectifs du Guide sont :

  • d’amener l’avocate ou l’avocat qui intervient dans des dossiers de violence sexuelle et de violence conjugale à adopter une pratique professionnelle qui va au-delà du simple respect des règles déontologiques qui lui incombent;
  • de recenser les meilleures pratiques pour que cet exercice soit fait dans le respect des droits de la personne victime.

Citations

« L’ensemble des actrices et acteurs du système de justice doit participer au changement de culture nécessaire dans le système de justice. Ce guide reflète la volonté d’améliorer l’accompagnement des personnes victimes de violences sexuelle et conjugale. Nous sommes convaincus que ce document assurera le développement de meilleures pratiques et permettra aux actrices et acteurs de la justice d’être mieux outillés. »

https://www.barreau.qc.ca/media/3214/guide-meilleures-pratiques-interrogatoires-contre-interrogatoires.pdf

Si le lien est brisé: guide-meilleures-pratiques-interrogatoires-contre-interrogatoires

L. Marshall, F. Champagne,  C. Sturgeon, et P. Bryce I (1997) Améliorer l’estime de soi des agresseurs d’enfants ; Sexual  Abuse:  A  Journal  of Research  and  Treatment,  Vol. 9,  No.  4,  1997:

« Divers théoriciens ont suggéré l’existence d’un lien entre une faible estime de soi et la propension à adopter des comportements sexuellement abusifs (Finkelhor, 1984 ; Groth, 1979) (…) Selon les premiers théoriciens (Coopersmith, 1967, Wylie, 1961), la faible estime de soi trouve son origine dans les relations parents/enfants, bien qu’il soit évident que des expériences ultérieures peuvent également renforcer ou réduire le sentiment d’estime de soi d’une personne (Browne & Dutton, 1995 ; Spencer & Steele, 1992) et que personne n’a encore exclu une contribution génétique.  Les parents qui jugent et ne récompensent pas, ou qui pratiquent une discipline incohérente et sévère, non seulement ne parviennent pas à inculquer à leurs enfants un sentiment d’estime de soi, mais ils ne leur fournissent pas de modèles de comportement social approprié et ne leur donnent pas l’occasion de pratiquer ce comportement (Harter, 1987, 1990 ; Mischel, 1981).  On dit de ces parents qu’ils forment des liens d’attachement médiocres avec leurs enfants (Bowlby, 1969 ; Rothbard & Shaver, 1994), ce qui entraîne divers problèmes dans les relations adultes (Sperling & Berman, 1994).  Il a été démontré que les agresseurs d’enfants ont eu des relations problématiques avec leurs parents (Marshall & Barbaree, 1990 ; Marshall & Mazzueco, 1995) et ces difficultés dans leurs attachements parentaux ont été empiriquement liées à leur confiance en soi à l’âge adulte (Marshall & Mazzucco, 1995). (…)

L’étude de Marshall, Anderson et Champagne (1996) fournit des détails sur la vaste gamme de caractéristiques que les délinquants sexuels partagent avec les sujets ayant une faible estime de soi.  Voici un résumé des caractéristiques communes qui semblent les plus pertinentes pour le traitement.  Pour réussir le traitement des délinquants sexuels, il est essentiel qu’ils participent effectivement au traitement en prenant part aux discussions de groupe, en acceptant d’essayer de nouveaux comportements et d’adopter de nouvelles attitudes, en adoptant de façon persistante ces nouveaux comportements et en s’engageant fermement à changer de comportement.  Ces délinquants ont souvent des problèmes d’estime de soi avec tous ces aspects du traitement et Marshall et al. suggèrent que c’est parce qu’ils souffrent d’une faible estime de soi.  Par exemple, les personnes qui ont une faible estime d’elles-mêmes sont réticentes à s’engager dans le changement (Mayo, 1978 ; Rodin, Elias, Silberstein et Wagner, 1988), hésitent à essayer de nouveaux comportements ou à accepter des croyances différentes (Baumeister, Tice et Hutton, 1989), ne font pas les exercices nécessaires pour acquérir de nouvelles compétences (Blaine et Crocker, 1993 ; Tice, 1993), se découragent facilement dans leurs efforts pour changer (Heatherton & Ambady, 1993), et renoncent facilement à essayer (Marecek & Mettee, 1972) parce qu’ils s’attendent à échouer (Shrauger, 1975). De plus, les personnes qui ont une faible estime d’elles-mêmes résistent aux efforts visant à améliorer leur confiance ou réinterprètent les commentaires encourageants afin de maintenir leur mauvaise image de soi (Spencer, Josephs, & Steele, 1993).

L’intérêt d’améliorer l’estime de soi des délinquants sexuels concerne non seulement la motivation à participer effectivement au traitement, mais aussi l’influence de cette amélioration sur d’autres aspects dysfonctionnels de ces clients.  Par exemple, les personnes qui ont une faible estime d’elles-mêmes déforment l’information disponible de façon intéressée (Blaine et Crocker, 1993) et les délinquants sexuels se caractérisent par des perceptions et des cognitions déformées qui facilitent la commission d’infractions (Abel et coll., 1989).  De même, un manque de préoccupation empathique caractérise à la fois les sujets ayant une faible estime de soi (Hutton, 1991) et les délinquants sexuels (Marshall, Hudson, Jones, & Fernandez, 1995), et nous avons constaté que l’estime de soi et l’empathie envers la victime sont toutes deux déficientes et significativement corrélées chez les agresseurs d’enfants (Marshall, Champagne, Brown, & Miller, sous presse). Les sujets ayant une faible estime d’eux-mêmes ont de graves problèmes d’interactions sociales et de relations avec autrui (Baumeister, 1993 ; Byrne, 1971 ; Murstein, 1972 ; Rosenberg, 1965) et les délinquants sexuels présentent des déficiences similaires en matière d’intimité (Seidman, Marshall, Hudson, & Robertson, 1994) et d’autres difficultés sociales (Marshall & Fernandez, 1997b).  Enfin, on a constaté que la détresse émotionnelle d’une sorte ou d’une autre (p. ex., la colère, l’anxiété, la dépression) est un précurseur important de la délinquance sexuelle (Pithers, Beal, Armstrong et Petty, 1989) et les sujets qui ont une faible estime de soi ont généralement des problèmes émotionnels semblables (Pelham, 1993 ; Tennen et Affleck, 1993). »

W. L. MARSHALL; EMILY CRIPPS; D. ANDERSON; FRANCA A. CORTONI; Queen ’s University (1999) Self-Esteem and Coping Strategies in Child Molesters ; JOURNAL OF INTERPERSONAL VIOLENCE / September 1999

« Il a été suggéré qu’une faible estime de soi est un facteur important dans l’étiologie et le maintien de la délinquance sexuelle, et qu’il faut y remédier pour que le traitement soit efficace (Marshall, Anderson, & Champagne, 1996 ; Marshall & Barbaree, 1990). La recherche a confirmé que les délinquants sexuels manquent effectivement d’estime de soi (Marshall, 1997 ; Marshall, Champagne, Brown, & Miller, 1997 ; Overholser & Beck, 1986), et que ce déficit peut être modifié par un traitement (Marshall, 1996 ; Marshall, Champagne, Sturgeon, & Bryce, 1997). Sur le plan étiologique, nous avons suggéré qu’une faible estime de soi fait que les délinquants sexuels ont peur de faire face aux situations problématiques, de sorte qu’ils apprennent assez tôt dans leur vie à adopter des moyens dysfonctionnels de faire face au stress. »

INVENTAIRE D’ESTIME DE SOI SOCIALE (IESS) (Lawson, Marshall, McGrath, 1979)

L’Inventaire d’estime de soi social (Social Self-Esteem Inventory ; Lawson, Marshall & McGrath, 1979) :  Cet instrument est composé de 30 items descriptifs dont la moitié est sous forme d’affirmations positives et l’autre moitié sous forme d’affirmations négatives. Les participants doivent répondre aux questions en se référant à une échelle de type «Likert» en six points qui va de complètement différent de moi (1) à exactement comme moi (6). L’inventaire a été traduit et adapté en français par Gauthier,  Samson, Turbide et Lawson (1981). Cette version fait preuve d’une bonne consistance interne (alpha = .93) et d’une fidélité test-retest élevée pour une période de cinq semaines (r= 0.95; p< .001).

inventaire_d_estime_de_soi_sociale

Référence : Locke, H. J., & Wallace, K. M. (1959). Short marital adjustment and prediction tests : Their reliability and validity. Marriage and Family Living, 21, 251-255.

Description de l’échelle :

Le test d’ajustement à la vie conjugale de Locke-Wallace (Locke et Wallace 1959) est l’une des deux mesures de la satisfaction conjugale les plus utilisées (avec 3322 citations en janvier 2017), et est librement disponible pour la recherche et la pratique thérapeutique. Le Locke-Wallace* est une courte mesure d’auto-évaluation (15 items) de la satisfaction conjugale et des points de désaccord. La mesure utilise un système de notation complexe avec une pondération de dix items.
Des scores plus élevés reflètent une meilleure satisfaction conjugale et une plus grande entente entre les conjoints. Les scores de l’échelle de Locke-Wallace* vont de 2 à 158, avec un seuil de 100. Les scores inférieurs à 100 indiquent une insatisfaction conjugale ou une inadaptation. La mesure est administrée à chaque partenaire séparément, nécessite environ 5 minutes d’administration et est disponible en format papier-crayon et électronique.

Description de la mesure
Le Locke-Wallace* a été développé dans le but d’utiliser les items les plus fondamentaux des mesures existantes, mais plus longues, de la satisfaction conjugale pour créer une mesure courte de la satisfaction conjugale. Les items choisis pour être inclus dans le Locke-Wallace* sont ceux qui ont fourni le plus haut niveau de discrimination dans les études originales, qui n’ont pas fait double emploi avec d’autres items et qui ont été utilisés pour mesurer la satisfaction conjugale.
La mesure initiale a été élaborée dans les années 1950 à partir d’un échantillon composé principalement de Blancs, de personnes instruites et de professionnels. La mesure a été revalidée par d’autres chercheurs au fil du temps afin d’évaluer son utilisation continue en tant que mesure de la satisfaction conjugale compte tenu de son âge (par exemple, Cross et Sharpley 1981 ; Freeston et Plechaty 1997) ; cependant, les échantillons de recherche ultérieurs ont été similaires en termes de caractéristiques démographiques à l’échantillon de développement initial.La validité du Locke-Wallace* dans l’évaluation de la qualité conjugale des mariages d’autres races et ethnies reste largement inexplorée. L’échelle de Locke-Wallace* consiste en une échelle globale de satisfaction conjugale, sans sous-échelle.
Il présente également une forte corrélation avec les mesures de la satisfaction sexuelle, de la communication et des sentiments positifs à l’égard du conjoint (Arias et O’Leary 1985), et il est sensible aux changements de traitement (Margolin et Weiss 1978).

Psychométrie
Le test de Locke-Wallace* a été initialement normalisé sur un échantillon de 236 participants, dont 48 étaient connus pour être dans un mariage insatisfait (Locke et Wallace 1959). Le score moyen du groupe des satisfaits
était de 135,9, tandis que le score moyen du groupe insatisfait était de 71,7. Cette différence était statistiquement significative et différenciait les personnes martialement satisfaites des personnes martialement insatisfaites. La cohérence interne a été testée en utilisant la méthode des moitiés divisées corrigée par la formule de Spearman-Brown, et a révélé un coefficient de fiabilité de 0,84, indiquant que l’échelle a une bonne fiabilité.
En raison de l’ancienneté de l’échelle de Locke-Wallace*, d’autres chercheurs ont mené des études ultérieures pour évaluer la fiabilité, la validité et la pertinence de l’échelle de Locke-Wallace* à la lumière de l’évolution des valeurs plusieurs décennies après son élaboration (Cross et Sharpley, 1981 ; Freeston et Plechaty, 1997). Cross et Sharpley ont effectué une analyse discriminante, une analyse d’items et une analyse factorielle sur 95 hommes et femmes mariés (non mariés entre eux). Les résultats de cette étude ont révélé que l’échelle de Locke-Wallace* continue de mesurer efficacement l’ajustement conjugal. Tous les items ont permis de distinguer les partenaires satisfaits des partenaires insatisfaits. Il est à noter que les items 1 et 14, seuls ou en conjonction, classent correctement les partenaires satisfaits.Cela suggère que ces items peuvent être utilisés pour une évaluation rapide de la satisfaction conjugale. Freeston et Plechaty (1997) ont également constaté que le Locke-Wallace* donnait des résultats adéquats et que le score total permettait de distinguer les hommes et les femmes satisfaits des insatisfaits.

questionnaire d’ajustement à la vie conjugale

 

ÉCHELLE DE RISQUE DE VIOLENCE (VRS-SO): VERSION POUR DÉLINQUANTS SEXUELS, ITEMS STATIQUES ET DYNAMIQUES

 Le VRS-SO (VIOLENCE RISK SCALE–SEX OFFENDER- Sexual Offender -Wong et al., 2004-2006) a été développé pour évaluer le risque des délinquants sexuels à l’aide de variables dynamiques et statiques liées à la récidive sexuelle. Il a été dérivé du VRS et possède la même plateforme que celui-ci, en partie pour faciliter le transfert des connaissances et des compétences d’un outil à l’autre.

Le VRS-SO comporte 7 variables statiques et 17 variables dynamiques et, comme dans le VRS, chaque variable est évaluée sur une échelle à 4 points (0, 1, 2, 3).

En général, des notes plus élevées indiquent que la variable est plus étroitement liée à des comportements sexuels ou non sexuels inappropriés.

Les items statiques ont été identifiés par des procédures purement statistiques ; un ensemble de variables statiques représentatives ont chacune été corrélées avec le résultat, et les prédicteurs les plus forts ont été retenus et rééchelonnés sur une échelle à 4 points.

Les items dynamiques ont été identifiés après un examen détaillé de la littérature sur le risque (par exemple, Hanson & Harris, 2000 ; Proulx et al., 1997), y compris les contributions de la théorie de la prévention des rechutes (Pithers, 1993 ; Ward & Hudson, 1998) et de la théorie de la psychologie de la conduite criminelle (Andrews & Bonta, 2003). Les variables de l’échelle ont ensuite été choisies statistiquement pour maximiser la validité du contenu de l’échelle. Comme pour l’échelle VRS, une note de 2 ou 3 points sur les variables dynamiques signifie que l’item est lié à un risque accru de récidive sexuelle, c’est-à-dire qu’il est criminogène, et doit donc faire l’objet d’un traitement. Les évaluations des étapes du changement avant et après le traitement sont identiques à celles du VRS.

Une analyse factorielle des items dynamiques a suggéré la présence de trois grands facteurs appelés déviance sexuelle (mode de vie déviant, compulsion sexuelle, planification d’infraction, cycle de délinquance sexuelle, préférences sexuelles déviantes), la criminalité (personnalité criminelle, agressivité interpersonnelle , toxicomanie, soutien communautaire, impulsivité, respect de la surveillance communautaire) et réceptivité au traitement (distorsions cognitives, capacité d’introspection, libération dans des situations à haut risque, respect du traitement). Deux des items (contrôle émotionnel et déficits d’intimité) ne se sont pas chargés (voir Olver, Wong, Nicholaichuk, & Gordon, 2007).

La structure factorielle de l’instrument est cohérente avec les principaux domaines de facteurs de risque identifiés dans la littérature (c’est-à-dire la déviance sexuelle et l’antisocialité). Il est prouvé que différents types de délinquants sexuels obtiennent des scores différents pour les trois facteurs. Par exemple, des recherches sur le VRS-SO ont montré que les agresseurs d’enfants ont tendance à obtenir des scores plus élevés en matière de déviance sexuelle et plus faibles en matière de criminalité, par rapport aux violeurs, qui présentent le schéma inverse (plus élevés en matière de criminalité et plus faibles en matière de déviance sexuelle), et aux délinquants mixtes qui obtiennent des scores assez élevés pour les deux (Olver et al., 2007).

Les scores obtenus pour chacun des trois facteurs fournissent des indications générales sur la localisation principale du risque de récidive sexuelle. Un examen plus approfondi des éléments composant les facteurs peut être utilisé pour mettre en évidence des domaines problématiques plus spécifiques à traiter. Par exemple, certains violeurs présentent des schémas d’excitation déviants (par exemple, une préférence pour les rapports sexuels avec violence) et peuvent donc nécessiter des interventions de modification de l’excitation. Cependant, pour ceux qui n’ont pas une telle préférence, l’intervention peut être axée sur d’autres aspects, comme l’agressivité, l’impulsivité et le manque de soutien communautaire. L’évaluation et le traitement doivent être intégrés ; l’évaluation doit informer le traitement de manière à ce qu’il soit ciblé et prescriptif.

Fiabilité et validité du VRS-SO

De plus en plus de recherches soutiennent la validité et la fiabilité du VRS-SO (Beggs & Grace, 2007 ; Beyko & Wong, 2005 ; Olver & Wong, 2006 ; Olver et al., 2007). Olver et al. (2007) ont examiné les propriétés psychométriques du VRS-SO dans un échantillon de 321 délinquants sexuels traités. Sur la base d’informations détaillées, les délinquants ont été évalués sur les items du VRS-SO. Suivis pendant une moyenne de 10 ans, environ 25% de l’échantillon a été condamné pour un nouveau délit sexuel au cours du suivi.  Les scores totaux du VRS-SO prédisaient significativement la récidive sexuelle (r=0,34, aire sous la courbe = 0,72) et ont démontré une fiabilité inter-juges acceptable (coefficient de corrélation intraclasse = 0,79) et une cohérence interne ( α = 0,84).

LES VARIABLES DYNAMIQUES SONT-ELLES RÉELLEMENT DYNAMIQUES ?

Bien que de nombreux travaux théoriques et empiriques aient été réalisés pour identifier les variables dynamiques putatives liées à la délinquance non sexuelle et sexuelle, peu de recherches ont abordé de manière spécifique la question de savoir si les variables dynamiques sont réellement dynamiques – c’est-à-dire établir des liens entre les changements dans les variables dynamiques et les changements dans la récidive en général ou la récidive sexuelle en particulier (Douglas & Skeem, 2005 ; Kraemer et al., 1997).

Une façon d’établir un tel lien est d’évaluer les variables dynamiques putatives à deux moments pour mesurer le changement – par exemple, avant et après le traitement. Les délinquants sont ensuite suivis après leur libération dans la communauté pour déterminer les liens entre les changements observés et la récidive. Il est essentiel que les évaluateurs des changements soient aveugles aux résultats de la récidive pour éviter les confusions et les biais potentiels. Un petit nombre d’études dans la littérature sur les délinquants sexuels l’ont fait explicitement. Hanson et Harris (2000) ont comparé 208 récidivistes sexuels à un échantillon de 201 non-récidivistes sur un grand nombre de variables dynamiques. Il s’agissait d’une étude rétrospective dans laquelle l’évaluation des comportements des délinquants a été obtenue sur les variables à deux moments (6 mois et 1 mois) avant la récidive sexuelle pour les récidivistes, ou aux deux moments précédant la collecte des données pour les non-récidivistes. Les évaluations des comportements antérieurs au délit des délinquants étaient fondées sur les informations contenues dans les dossiers et les souvenirs des agents de libération conditionnelle des délinquants, dont beaucoup avaient connaissance des résultats en matière de récidive des délinquants qu’ils supervisaient et, par conséquent, pouvaient ne pas être totalement impartiaux. Hanson et Harris (2000) ont constaté que l’augmentation de la colère entre les deux moments était associée à une augmentation de la récidive sexuelle ; il est intéressant de noter que les récidivistes étaient également plus susceptibles que les non-récidivistes d’avoir commencé à prendre des médicaments anti-androgèniques dans le mois précédant la récidive sexuelle. Les résultats de cette recherche ont permis de développer le SONAR, qui se compose de cinq facteurs stables – autorégulation sexuelle, autorégulation générale, attitudes tolérantes à l’égard de l’agression sexuelle (cognitions comme « droit au sexe, attitudes face au viol, attitudes propices à l’agression d’enfants), déficits d’intimité et influences sociales négatives – et de quatre facteurs aigus – toxicomanie, humeur négative, colère et accès aux victimes. Bien que les facteurs stables et les facteurs aigus aient contribué de manière significative à la prédiction du risque, il y avait peu de preuves que les changements dans ces facteurs étaient liés à la récidive sexuelle (Hanson, Harris, Scott, & Helmus, 2007, p. 25).

Hudson et al. (2002) ont corrélé les scores de changement pré-post de plusieurs mesures d’auto-évaluation des délinquants sexuels de 242 délinquants sexuels traités et ont trouvé des corrélations inverses modestes mais statistiquement significatifs de certaines de ces mesures (mauvaise gestion de la colère, faible empathie, malaise social) avec la récidive sexuelle – c’est-à-dire que des changements plus importants étaient liés à une récidive sexuelle plus faible. Bien que la littérature examinant le risque de violence sexuelle dynamique soit limitée à quelques études, les résultats disponibles apportent un soutien croissant à la nature changeante des variables dynamiques et suggèrent que l’amélioration ou la détérioration des domaines de besoins criminogènes des délinquants sexuels est associée à une augmentation ou à une diminution de la récidive.

La nature dynamique du VRS-SO a été testée en évaluant les éléments dynamiques du VRS-SO au début et à la fin du traitement (à environ 6 à 8 mois d’intervalle, en moyenne). De manière peut-être plus significative, les scores de changement calculés à partir des items dynamiques avant et après le traitement se sont avérés être significativement inversement liés à la récidive sexuelle après avoir contrôlé le risque actuariel (c’est-à-dire le score statique du VRS-SO) et les différences dans la durée du suivi par une analyse de survie par régression de Cox, VRS-SO statique Wald (1) = 41,33, p < .001, exp( B ) = 1,23 ; changement dynamique Wald (1) = 3,94, p < .05, exp( B ) = 0,90. En termes pratiques, une exp(B ) de 0,90 signifierait que chaque point de changement de score permettrait de prédire une diminution de 10 % de la récidive sexuelle, après prise en compte du risque. En outre, on a constaté que le changement de traitement prédisait mieux la récidive chez les délinquants à haut risque ( r = -0,15, p < 0,05), qui ont plus à changer, que chez les délinquants à faible risque ( r = -0,01, ns ) qui ont moins à changer – c’est-à-dire en raison de l’effet plancher. Lorsque les scores de changement ont été examinés sur les trois facteurs après contrôle du risque statique, seuls les scores de changement de déviance sexuelle étaient significativement associés à des réductions de la récidive sexuelle, Wald (1) = 3,73, p = 0,053, tandis que les scores statiques continuaient à être associés à une augmentation de la récidive, Wald (1) = 42,14, p < 0,001.

En résumé, les analyses des changements confirment que les items dynamiques du VRS-SO sont dynamiques, c’est-à-dire que les changements positifs sont liés à une réduction de la récidive. Les résultats sont également conformes au principe du risque (Andrews et Bonta, 2003), c’est-à-dire que le traitement a plus d’impact sur les délinquants à haut risque que sur ceux à faible risque.

Les résultats sont également conformes au principe du risque (Andrews et Bonta, 2003), c’est-à-dire que le traitement a plus d’impact sur les délinquants à haut risque que sur ceux à faible risque.

Les résultats des analyses du score de changement de VRS donnent des résultats similaires (Lewis et al., 2008). Les scores de changement de VRS étaient inversement corrélés aux récidives criminelles avec violence ( r = -0,26, p < 0,001) après plus de 6 ans de suivi post-traitement – autrement dit, un changement de traitement plus important était lié à des taux plus faibles de récidive avec violence. La relation entre le changement de traitement et la récidive violente s’est maintenue après avoir contrôlé la durée du suivi et le niveau de risque avant traitement à l’aide d’analyses de survie par régression de Cox.

VRS-SO_feuille_codage (trad fr)

VRS-SO Calculator & Scoring Workbook

Franca CORTONI (CICC 2022) Meilleures pratiques en matière d’interventions pour les auteurs d’agressions sexuelles

Conférence-CICC du 1er mars 2022 de Franca Cortoni, professeure titulaire de psychologie criminologique à l’École de criminologie de l’Université de Montréal et chercheure au CICC.
Plus de détails: https://www.cicc-iccc.org/fr/evenements/conferences/meilleures-pratiques-en-matiere-dinterventions-pour-les-auteurs-dagressions-sexuelles

Résumé

Un certain nombre d’études ont conclu que le traitement des comportements délinquants sexuels réduit avec succès la récidive. Cependant, un certain nombre de méta-analyses ont également conclu que les preuves de l’efficacité du traitement des délinquants sexuels sont, au mieux, faibles, surtout en raison de modèles expérimentaux inadéquats. Quelles sont donc les composantes efficaces du traitement appuyées par des données empiriques, et que devrions-nous faire pour améliorer nos pratiques? Cette conférence donnera un aperçu des composantes et des données empiriques qui appuient (ou non!) leur utilisation dans le traitement. Les approches de traitement et les questions de réceptivité seront également abordées, car il s’agit de composantes intégrales dont il faut tenir compte lors de la conception et de la mise en œuvre d’un programme de traitement fondé sur des données empiriques conçu pour réduire la récidive sexuelle. La conférence se terminera par une discussion sur les implications et la nécessité de recherches futures.

 

FRANCE CULTURE, Série documentaire LSD (2022) l’Inceste

La perception sociale et culturelle de l’inceste a évolué au fil des siècles. « Au Moyen Âge, l’inceste était considéré comme un acte consenti et non comme une violence sexuelle imposée à l’enfant. Dans la société patriarcale du XIXe siècle, on faisait peu de cas des atteintes à l’intégrité morale des enfants violentés. Le déni et la loi du silence dominaient. »

Mais comment la société n’a-t-elle pas saisi plus tôt l’impact de cette monstruosité ? Comment a-t-elle laissé faire l’inceste ?

On sait désormais qu’entre 5 et 10% des Français ont été victimes de violences sexuelles dans l’enfance, le plus souvent dans la sphère familiale. Pourtant, le système juridique est gravement défaillant. 70% des affaires d’inceste sont classées sans suite. De nombreuses autres aboutissent à un non-lieu. 1% seulement des auteurs d’inceste sont sanctionnés pénalement. Première cause, la lenteur des enquêtes, mais aussi la non-reconnaissance de la parole des victimes. Pourtant, il s’agit bien d’un crime. La caution du déni, l’aliénation parentale, sont des concepts qui marchent et des mécanismes qui disent aussi quelque chose de la société que l’on fait.

Aujourd’hui, la reconnaissance de cette violence incestueuse et l’affirmation de l’enfant comme sujet de droits nous feraient-elles espérer la fin de la domination et de la toute-puissance ? Va-t-on enfin être capable d’être dans la culture de la protection, d’anticiper les faits par le repérage systématique et de pouvoir recueillir la parole des victimes ? En immersion à la brigade de la famille, en pleine audition de victimes de la CIIVISE, au CHU de Montpellier, en prison ou autour d’une table familiale, les mots sont dits. Vont-ils enfin être entendus ?

Une série documentaire de Johanna Bedeau eMarie-Laure Ciboulet.

Épisode 1 : La loi du silence

 L’inceste serait un « tabou », un acte interdit qui toucherait au sacré ou à l’impur et dont la transgression, rare, serait tenue secrète, au risque de polluer la société. »

Stop !
Stop ! Crédits : mrs – Getty

La perception sociale et culturelle de l’inceste a évolué au fil des siècles. “ Au Moyen Âge, l’inceste était considéré comme un acte consenti et non comme une violence sexuelle imposée à l’enfant “. “ Dans la société patriarcale du XIXe siècle, on faisait peu de cas des atteintes à l’intégrité morale des enfants violentés. Le déni et la loi du silence dominaient “.

Mais comment la société n’a-t-elle pas saisi plus tôt l’impact de cette monstruosité ? Comment a-t-elle laissé faire ? Le philosophe Marc Crépon, explique que “notre imaginaire collectif, toutes nos institutions et depuis très, très longtemps reposent sur la croyance que la famille est un espace de protection“ et poursuit-il “c’est pour ça, que dans le cas de l’inceste, le poids du silence est plus terrible que nulle part ailleurs. Il y a un redoublement du silence parce que le piège est le suivant : non seulement la famille, cet espace-là, nous détruit, mais on se sent pris en otage de cette destruction elle-même en ne voulant pas du même coup détruire la famille“.

Aujourd’hui la reconnaissance de cette violence incestueuse et l’affirmation de l’enfant comme sujet de droits nous feraient-elles espérer la fin de la domination et de la toute-puissance ? Une toute-puissance dont témoignent les victimes : “ ce qui m’écrabouillait, c’était son pouvoir et son abus de pouvoir sur nous. Ça veut dire que lorsqu’il dépassait les bornes sexuellement, c’était de la même manière qu’il dépassait les bornes dans toutes les situations de la vie, “ et qu’analyse l’anthropologue Dorothée Dussy, “ l’inceste sert à inculquer de façon violente, mais massive et radicale les rapports de domination. “

Une plongée dans l’histoire de ce crime généalogique sous le poids du secret pour interroger la

manière dont il prospère dans les silences familiaux, les peurs des enfants et les sentiments destructeurs de culpabilité.

Un documentaire de Johanna Bedeau et Marie-Laure Ciboulet.

Épisode 2Police justice au cœur du déni

La caution du déni, l’aliénation parentale, des concepts qui fonctionnent et des mécanismes qui disent aussi quelque chose de la société que l’on fait.

Petit garçon flou dans l'ombre derrière une vitre
Petit garçon flou dans l’ombre derrière une vitre Crédits : Jasmin Merdan – Getty

On sait désormais qu’entre 5 et 10% des Français ont été victimes de violences sexuelles dans l’enfance, le plus souvent dans la sphère familiale. Pourtant, le système juridique est gravement défaillant. 70% des affaires d’inceste sont classées sans suite. De nombreuses autres aboutissent à un non-lieu. 1% seulement des auteurs d’inceste sont sanctionnés pénalement. Première cause, la lenteur des enquêtes comme le rappelle l’avocate Cécile De Oliveira : “ Là où la justice devrait être vraiment perfectible, c’est dans les délais de traitement de ces affaires“. Cette lenteur, comme en témoignent les victimes est une souffrance supplémentaire : “ Moi en l’occurrence, je suis mort émotionnellement. J’ai eu une anesthésie émotionnelle de 11 ans et demi, jusqu’à mes 34 ans au sortir du procès le 29 mai 2013. “

Un autre problème est la non-reconnaissance de la parole des victimes. Pourtant, il s’agit bien d’un crime, pour Ernestine Ronai, responsable de l’Observatoire départemental des violences envers les femmes de Seine-Saint-Denis, “ la justice, actuellement, n’est pas capable ou ne veut pas protéger les petits enfants qui parlent d’inceste. “ Alors que rappelle-t-elle “ ce qui est fondamental au départ, c’est l’audition de l’enfant, parce que c’est par l’audition de l’enfant que le magistrat va décider ou non de poursuite “, par ailleurs, elle souligne l’importance de la formation des policiers : “ Il faut que les policiers, les gendarmes soient formés et je ne dis pas seulement formés, il faut qu’ils soient volontaires pour faire ça, qu’ils aient envie de le faire. “

Edouard Durand juge pour enfants et co-président de la CIIVISE, constate également un dérèglement au niveau judiciaire : “ La mise en pratique de la loi reste insuffisamment protectrice. L’immensité des classements sans suite des plaintes déposées pour des violences sexuelles faites aux enfants et le nombre extrêmement faible de condamnations montrent que les agresseurs bénéficient, quoiqu’on dise d’un système d’impunité. “

Mais pourquoi la justice française a tant de mal à croire les victimes ? Pourquoi lorsqu’une mère porte plainte, on ne la croit pas, et on la culpabilise ?

C’est l’histoire d’une mère qui est mal reçue par justice. Une très longue histoire parmi tant d’autres.

Un documentaire de Johanna Bedeau et Marie-Laure Ciboulet.

Épisode 3 : Prendre en charge les agresseurs

Quelle est la prise en charge possible pour des hommes considérés comme dangereux ?

Homme derrière une vitre de pluie
Homme derrière une vitre de pluie Crédits : Vandervelden – Getty

Au CHU de Montpellier, dans l’unité de soins Urgence et Post-Urgence Psychiatrique de l’hôpital Lapeyronie, des patients viennent en consultations spécialisées et répondent aux questions du Dr Lacambre.

Dans ce centre ressource pour les intervenants auprès des auteurs de violences sexuelles toute l’équipe tente d’apporter des soins pour les personnes présentant des déviances ou perversions sexuelles. Linda Tromeuleue, psychologue clinicienne évoque leur profil : “ Si je reste sur une approche psychologique, ce qui est constaté, c’est un problème narcissique de très, très grande envergure chez quasiment chacun d’entre eux, ce sont des sujets souvent très égocentriques, très centrés sur eux-mêmes, rigides, qui ne critiquent pas leur manière de voir et d’appréhender les choses. “ Par ailleurs, elle ajoute que ces sujets “ ont un rapport pathologique au secret. On pourrait même dire à la vérité. Si bien d’ailleurs que lorsque nous les prenons en charge, ils se taisent. Ils dissimulent, ils minimisent, ils banalisent. “

Outre les entretiens individuels et la thérapie de groupe certains sont aidés de médicaments anti-androgènes, ou via une reprise de parole avec la famille. Ouvert depuis une dizaine d’années, le service assiste à des demandes qui ne cessent d’augmenter, en 2021, plus de 400 personnes ont été suivies. Ainsi, le Dr Mathieu Lacambre explique : “ Il s’agit de patients qui sont orientés soit par la justice ou après une condamnation pour avoir commis une infraction à caractère sexuel depuis la cyber pédopornographie jusqu’à des agressions sexuelles sur mineurs ou des viols. Et puis, on a une petite portion congrue qui est en train d’augmenter progressivement, d’année en année, de patients qui viennent spontanément. “

En France, cette clinique de la prévention, au carrefour de la psychologie et de la criminologie, est compliquée à mettre en marche, tant il existe des réticences de la société à s’occuper des agresseurs comme le confirme la psychiatre Magali Bodon “ Bien sûr qu’il faut prendre en charge les auteurs pour qu’il y ait moins de récidives, qu’il y ait moins d’actes et moins de victimes. Mais, je crois que très honnêtement, il y a quelque chose de l’ordre d’une résistance. Ça passe moins bien de s’occuper des auteurs quand même. “

Un documentaire de Johanna Bedeau et Marie-Laure Ciboulet.

Épisode 4Enfin une prise de conscience collective

On dit souvent aux victimes d’inceste « il faut parler », mais n’est-ce pas d’abord à la société et aux professionnels de l’enfance de provoquer cette parole ?

Mains devant les yeux de l'homme et de femme surpris de bouche
Mains devant les yeux de l’homme et de femme surpris de bouche Crédits : adl21 – Getty

Est-on en train de vivre un moment historique ? “ Va-t-on enfin être capable d’être dans la culture de la protection, d’anticiper les faits par le repérage systématique et de pouvoir recueillir la parole des victimes “ s’interroge Edouard Durand juge pour enfants et co-président de la CIIVISE. Va-t-on réussir à voir ce que l’on ne voulait pas voir : ces criminels incestueux qui comme le dénonce Pierre Levy Soussan expert psychiatre, “ ont réussi à s’invisibilité, ont profité de toutes les failles, y compris de l’idéologie : de l’idéologie de certains juges, de l’idéologie de certains élus. Ils ont abusé de nos points aveugles. Le tabou de la violence sexuelle parentale n’a d’égal que le totem du lien biologique. “

Dans un bureau du ministère de la santé, dans un foyer ou en pleine audition de victimes dans une ville de France, Edouard Durand et Nathalie Mathieu recueillent la parole pour mieux soigner et protéger. La société va-t-elle enfin prendre conscience de l’ampleur des violences sexuelles pendant l’enfance et la gravité des traumatismes éprouvés par les victimes ?

Au cœur de cette commission il y a le recueil des témoignages pour mieux protéger les victimes. Mais il y a aussi la construction d’un meilleur savoir, pour les pouvoirs publics et pour la société, pour mieux comprendre le phénomène et surtout mieux le repérer. Des enquêtes, des recherches, et un programme de prévention pour éviter que ne continue ce que constate la psychiatre Muriel Salmona : “ Tout est fait pour que les victimes ne puissent pas parler. La majorité des victimes de ces violences sexuelles sont hyper traumatisées. Avec des mécanismes de survie qui sont extrêmes, donc en état de choc traumatique continuel, “ une parole trop longtemps mise de côté comme en témoignent souvent les victimes : “ j_’ai quand même beaucoup parlé, beaucoup parlé, sans être entendu_“.

Telle sera la mission de la Commission Indépendante sur l’Inceste et les Violences Sexuelles faites aux Enfants dans laquelle notre documentaire sera plongé.

Un documentaire de Johanna Bedeau et Marie-Laure Ciboulet.