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L’émission « Specimen » de la RTS présente ici différentes expériences réalisées autour de la psychopathie, comme le fameux « dilemme du trolley » de Judith Jarvis THOMSON et autres experiences psychologiques et/ou neuropsychologiques

Le dilemme du trolley

trolley2« Imaginez une situation – que j’appellerai “Homme obèse” – où vous êtes sur un pont sous lequel va passer un tramway hors de contrôle se dirigeant vers cinq ouvriers situés de l’autre côté du pont. Que faites-vous ? Étant un expert en tramways, vous savez qu’une manière sûre d’en arrêter un hors de contrôle est de placer un objet très lourd sur son chemin. Mais où en trouver un ? Au moment des événements, il y a un homme obèse, vraiment très obèse, à côté de vous sur le pont. Il est penché au-dessus du chemin pour regarder le tramway. Tout ce que vous avez à faire est de lui donner une petite poussée pour qu’il tombe sur les rails et bloque le tramway dans sa course. Devriez-vous poser ce geste ? » (Judith Jarvis THOMSON , « Trolley problem », Yale Law Journal, vol. 94, 1985.)

 

voir aussi à propos de la psychopathie: psychopathie

Kate KEENAN (2003) Le développement et la socialisation de l’agressivité pendant les 5 premières années de la vie

(…) La socialisation de l’agression repose sur un large spectre de processus. Dans l’idéal, elle s’amorce au contact d’une bonne attention parentale dès le début de l’existence; elle s’étend par la suite de manière à englober la socialisation de la maîtrise du comportement, de réactions empathiques et des aptitudes  à la résolution de problèmes. Une réaction parentale inappropriée à la dysrégulation des émotions et des comportements des jeunes enfants semble accroître le risque de problèmes d’agressivité à plus long terme. Cette réaction inappropriée va de la sous-réaction (réactions passives ou détachées) à la sur-réaction (réactions sévères). Shaw, Keenan et Vondra ont par exemple observé que l’absence de réaction maternelle face à un enfant exigeant est prédictive de problèmes de comportements perturbateurs à trois ans. Bates  et al. ont, de leur côté, analysé les conséquences d’un parentage autoritaire ou passif chez un groupe d’enfants d’âge préscolaire « difficiles » et « non difficiles ». Vers la fin de l’enfance, les enfants difficiles dont les parents sont passifs ont obtenu les pires résultats en termes de problèmes d’externalisation ultérieurs tels qu’évalués par les parents et les enseignants. Pour leur part, Campbell et ses collègues ont constaté que le contrôle maternel négatif (soit : « affect négatif et contrôle intrusif  … dans lequel la mère a eu une attitude négative/irritée à l’égard de l’enfant ») et le recours tel que rapporté par les mères à des techniques de discipline négative à l’âge de quatre ans est prédicteur de problèmes d’externalisation à neuf ans, en dépit de correctifs visant à tenir compte des problèmes de comportement antérieurs.

L’étude de l’impact des pratiques de socialisation sur les jeunes enfants a également fait ressortir des différences intéressantes entre les sexes. À la fin de la période préscolaire, les taux d’agressivité sont généralement plus faibles chez les filles que chez les garçons. Smetana a observé que les mères réagissent aux transgressions de leurs filles en faisant ressortir les conséquences de celles-ci sur leurs pairs, alors que les mères de garçons ont recours à la punition. À l’âge de trois ans,  les garçons commettent deux fois plus de transgressions que les filles.Ross et al. rapportent que les mères de garçons prennent le parti de leurs propres enfants dans les conflits avec leurs pairs trois fois plus souvent que les mères de filles. De plus, les mères tendent à ne pas soutenir leurs filles lorsque leur droit de propriété a été violé.

Dans l’ensemble, les données actuelles sur le parentage indiquent qu’un enfant présente un risque plus élevé de développer des comportements agressifs quand les réactions des parents sont inappropriées à son développement, surtout lorsque l’enfant est déjà de tempérament difficile. Les mêmes données soulèvent la possibilité de l’existence d’un mécanisme qui entraîne une divergence des taux d’agressivité chez les garçons et chez les filles pendant les cinq premières années de la vie.

Conclusions

Les comportements agressifs, de même que leur socialisation, émergent tôt. Bien que la plupart des enfants apprennent à les inhiber, les comportements agressifs sont, chez certains, envahissants, fréquents et graves. Le débat sur la détermination d’une période de l’existence propice à la conceptualisation des problèmes de comportements perturbateurs précoces — dont l’agressivité — se poursuit.  Un consensus s’ébauche autour de la perspective de considérer les agissements de l’enfant comme atypiques lorsqu’ils gênent son développement au point où on lui demande de quitter la maternelle, où il manifeste de l’agressivité envers ses parents ou est incapable d’entretenir une relation prosociale avec un pair. Il est néanmoins important d’élaborer des méthodes adéquates et précises d’évaluation de la dysrégulation affective et comportementale précoce de manière à ce qu’un enfant n’ait pas à connaître de sérieux problèmes de développement avant de recevoir des services.

Implications pour l’élaboration des politiques et pour le développement des services

Les chercheurs en psychopathologie du développement ont maintenant l’occasion de faire avancer les politiques touchant la santé mentale des enfants. Des études plus approfondies devraient être menées sur des facteurs qui, dès la petite enfance, peuvent faire courir aux enfants des risques de vivre ultérieurement des problèmes comportementaux et affectifs.

Ce type de travaux contribuera sans aucun doute à susciter un élan politique favorable à des applications futures en psychopathologie du développement. Les données actuelles indiquent que la plupart des enfants s’abstiennent de recourir à des comportements problématiques. On peut donc considérer  la période préscolaire comme le meilleur moment pour encourager les comportements  prosociaux chez les enfants et pour leur inculquer des types de réponses qui optimisent les chances d’un développement social sain. Cependant, les études sur le développement des comportements chez les enfants et chez les parents devraient commencer pendant la grossesse afin que les facteurs environnementaux puissent être examinés individuellement et de façon interactive dans le temps. Une telle approche reconnaîtrait l’énorme potentiel de changement chez les jeunes enfants. Il pourrait également en découler une meilleure approche qui permettra d’orienter les processus de développement des enfants dans des directions plus positives.

 

http://www.enfant-encyclopedie.com/Pages/PDF/KeenanFRxp.pdf

Peut-on prédire, dans l’enfance, des troubles du comportement violent? les psychologues Richard Tremblay (Montréal) et Evelyne Thommen (lausanne) apportent quelques éléments de réponse.

L’émission suisse Specimen de la RTS reproduit ici l’expérience bien connue de Bandura (1979, « baby doll ») qui traite de l’apprentissage social de la violence .

L’agression est un comportement socialement appris, au même titre que n’importe quel comportement.

Le comportement agressif est appris de deux façons :

  • Il peut être appris directement (expérience personnelle) : un comportement est susceptible de se reproduire si l’on a été récompensé par ce comportement (conséquences positives).
  • Il peut être appris indirectement, par observation puis imitation des modèles auxquels l’individu peut se référer.

Deux mécanismes d’apprentissage indirect de l’agression :

  • En observant un modèle qui manifeste un comportement agressif, l’individu prend tout simplement connaissance de ce type de comportement (acquisition de nouveaux comportements).
  • L’individu observe le comportement et ses conséquences pour le modèle. Si les conséquences sont positives, l’individu apprend que ce comportement peut lui être utile et aura tendance à l’imiter.

Pour vérifier la théorie de l’apprentissage de comportements agressifs par observation et imitation, Bandura fait une expérience auprès d’enfants :

  • Un groupe d’enfants est confronté à un adulte qui se comporte de façon agressive envers une poupée.
  • Un autre groupe d’enfants est confronté à un modèle pacifique, qui joue avec tous les jouets de la salle sans se préoccuper de la poupée.
  • Le troisième groupe, groupe contrôle, n’est confronté à aucun modèle.
  • On observe ensuite les enfants dans la même salle. Les enfants qui ont été confrontés à un comportement agressif ont des comportements plus agressifs que ceux des autres groupes.
    Les enfants qui ont été confrontés à un comportement pacifique ont montré des comportements moins agressifs que ceux du groupe contrôle.

Voir des actes agressifs peut avoir un effet d’apprentissage de comportements et un effet de désinhibition (l’individu apprend que les comportements agressifs peuvent avoir des conséquences positives).

Emission « Specimen » de la chaine suisse RTS sur « La violence »

Un chercheur de Lausanne propose une expérience de frustration qui illustre la contagion de l’agressivité et de la vengeance sur des personnes totalement étrangères au mal qui lui a été fait…
Cette expérience illustre d’une autre façon les expériences sur la frustration-agression  de Leonard Berkowitz en 1969, réalisée avec des rats…

La théorie de la frustration-agression (John Dollard, Leonard Berkowitz)

Postulats :

  •  L’agression présupposerait toujours la présence de frustration, et la frustration provoquerait toujours l’agression. (Frustration : état psychologique qui résulte de l’impossibilité d’atteindre ses objectifs.)
  • L’intensité de l’agression serait proportionnelle à la frustration.
  • L’expression de l’agression aurait un effet cathartique, libérateur.
  • La cible privilégiée de l’agression est la source de la frustration. Cependant, en l’absence de cette source, le comportement agressif sera déplacé vers d’autres cibles, les boucs émissaires.
  • L’agression peut être inhibée totalement ou partiellement par l’anticipation d’une punition.

Exemple : Si une personne est frustrée sur son lieu de travail par son supérieur hiérarchique, elle ne peut pas s’en prendre à ce supérieur (anticipation de punition) donc elle peut déplacer son comportement agressif sur ses collègues ou son entourage familial.

Cette théorie de la frustration-agression s’est rapidement avérée être trop simpliste pour rendre compte de la complexité du comportement agressif : elle ne fait pas appel à beaucoup de facteurs psychosociaux.

  • La frustration ne peut en aucun cas être le seul facteur déterminant du comportement agressif. Des facteurs liés à l’environnement physique peuvent être source d’agressivité (chaleur, foule…) sans qu’il y ait forcément frustration à la base.
  • Si la frustration peut favoriser des comportements agressifs, elle ne leur donne pas toujours lieu.

La théorie de la frustration-agression a été remaniée par Berkowitz : il explique dans quelles conditions la frustration aboutit à l’agression.

  • La frustration incite à l’agression uniquement lorsqu’elle suscite une émotion de colère.
  • La relation entre frustration et agression n’est pas linéaire puisqu’un taux important de frustration peut provoquer la résignation plutôt que la colère. La résignation ne provoque pas de comportement agressif.
  • La frustration, même lorsqu’elle suscite de la colère, augmente la tendance à être agressif mais ne déclenche pas forcément ce comportement.

Les facteurs déclencheurs du comportement d’agression seraient liés à des facteurs environnementaux appelés Indices Externes Facilitateurs. Ces indices peuvent être liés aux personnes présentes (cibles possibles de l’agression), à la situation dans laquelle le sujet se trouve, aux objets présents.
Berkowitz vérifie sa théorie dans une série d’expériences célèbres, dans lesquelles il montre que la présence d’indices externes facilitateurs favorise le comportement agressif chez l’individu frustré.

Expérience:

  • Les participants doivent réaliser une tâche quelconque.
  • Ils reçoivent ensuite peu ou beaucoup de chocs électriques, indépendamment de leur réussite à cette tâche.
  • Ils doivent ensuite administrer des chocs.
  • Pour la moitié des participants, des armes à feu sont visibles dans la pièce.

Résultats

  •  Les sujets frustrés infligent plus de chocs que les sujets non frustrés.
  • Pour les sujets non frustrés, le nombre de chocs administrés est plus important lorsque des armes à feu se trouvent dans la pièce.

 

 


 

When a kid commits a crime, the US justice system has a choice: prosecute to the full extent of the law, or take a step back and ask if saddling young people with criminal records is the right thing to do every time. In this searching talk, Adam Foss, a prosecutor with the Suffolk County District Attorney’s Office in Boston, makes his case for a reformed justice system that replaces wrath with opportunity, changing people’s lives for the better instead of ruining them.

Adam Foss: « As Assistant District Attorney in the Juvenile Division of Suffolk County, Adam Foss has become one of Boston’s leading voices for compassion in criminal justice. Recognizing that prosecutors have a unique opportunity to intervene in offender’s lives, Foss co-founded the Roxbury CHOICE Program, a collaborative effort between defendants, the court, the probation department, and the D.A. to recast probation as a transformative experience rather than a punitive process. In addition to his work with the DA’s office, Foss is the founder of the SCDAO Reading Program, a project designed to bridge the achievement gap of area elementary school students. »

Jessica LADD, TED Talk Feb 2016 : The reporting system that sexual assault survivors want

We don’t have to live in a world where 99 percent of rapists get away with it, says TED Fellow Jessica Ladd. With Callisto, a new platform for college students to confidentially report sexual assault, Ladd is helping survivors get the support and justice they deserve while respecting their privacy concerns. « We can create a world where there’s a real deterrent to violating the rights of another human being, » she says.

FRANCE INTER, Emission « La marche de l’histoire » (16/03/2016) L’événement pédophile

Procès de Michelle Martin, ex-femme de Marc Dutroux, à Bruxelles le 08/08/2012« La parole libérée passe par la voix médiatique » : l’association quoi porte ce nom est très connue maintenant. On sait qu’il est reproché à l’archevêque de Lyon d’avoir conservé des ministères exposés à deux prêtres dont il n’ignorait aucunement le passé.

 Le cardinal argue que les faits se sont enfoncés dans le temps et qu’ils sont prescrits. De plus, s’il y a bien une hypothèse fondamentale dans le christianisme, c’est la possibilité de la rédemption : un vieux salaud peut devenir un jeune pardonné. Une bonne partie de l’opinion ne l’entend plus ainsi. Pour beaucoup, la pédophilie est moralement imprescriptible. Ses normes entrent donc avec celles de l’Eglise – sur ce point comme sur bien d’autres.

Toutes les institutions dont la jeunesse et l’enfance sont la terre de mission se retrouvent d’ailleurs dans une situation exposée. Dès 1997, Ségolène Royal avait obtenu de l’Education nationale qu’elle communique de suite à la justice tout fait répréhensible: le non-signalement est même susceptible de sanctions juridiques. Au risque de négliger la présomption d’innocence et de jeter à la vindicte populaire toutes les personnes soupçonnées. La tragique méprise d’Outreau, il y a quinze ans, a montré que le danger était aussi là.

Ceux qui ont vécu dans les années 1970 ne s’attendaient pas à voir la pédophilie maintenant présentée comme le mal absolu. Comment d’ailleurs le mot est-il apparu,  pourquoi s’est-il imposé dans l’agenda médiatique ? Les contemporains des années 1970 s’attendaient en revanche à une extension progressive et perpétuelle de la libération sexuelle. En réalité, les droits des adultes se sont largement accrus et l’accès au corps des autres aussi, notamment par la pornographie mais ceci derrière un mur de protection étanche qui protège les moins de quinze ans. Comme quoi les libertés nouvelles peuvent avoir besoin d’interdits pour se construire !

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